Avec Yahne Le Toumelin, la peinture réintégre la Source de Lumière

Dans une époque où l'art – spécialement la peinture – bourbite dans les modes éphémères dédiées au Veau d'or (l'argent) et aux spéculations absconces d'un art contemporain qui a perdu tout Sens, la peinture de Yahne Le Toumelin me fait l'effet d'un jaillissement rafraichissant à la Source de Jouvence. Il s'agit en effet d'un retour, d'une ré-intégration à la Source, que la peinture – et d'ailleurs toute forme d'art – ne devrait jamais quitter, pour nous faire l'offrande du Sens sacré de la vie dans ses éblouissements de lumière.
Mais cette peinture est le fruit d'une vie pleine de richesses : Yahne Le Toumelin est d'abord bretonne – on pourrait dire celte, d'une culture plus proche de la culture orientale qu'occidentale. Elle suit l'enseignement de Gurdjieff pendant la guerre, puis elle devient femme du philosophe Jean-François Revel et mère de Mathieu Ricard, qui deviendra plus tard un des plus précieux ambassadeurs du boudhisme en Occident. Puis elle peint, elle expose, elle peint, entre autre, avec Béjart un immense décor de ballet, juste avant de partir dans les Himalayas pour devenir nonne ordonnée par le Karmapa et passer ainsi une vingtaine d'années auprès des grands maîtres tibétains. Quand elle revient, c'est pour s'installer en Dordogne, l'une des terres du boudhisme tibétain en exil, où elle médite en peignant - intégration suprême. De temps en temps, elle vient inonder de ses lumières, la grisaille de la grande ville, comme en ce moment (du 12 septembre au 13 octobre 2007) à Paris, à la galerie Christine Park, rue Quincampois.
Pour découvrir son oeuvre, le mieux est d'aller sur le site internet : www.rireduciel.com/
Dans un petit livre “Lumière, rire du ciel” paru en 2001, elle nous régale aussi de ses petites phrases incisives qui vont droit au but

"Imaginez une bande de bambins, encouragés par leur mère, assis sur le pot de chambre.
Chacun admire ce qu'il a fait, après les efforts convenus. Compétition, arrogance ou dépit évoquent les milieux artistiques.
Méditons : seul le produit d'un esprit clair, ouvert à sa nature essentielle, peut échapper à cette comparaison.
Tout ouvrage fut-il de grand goût, résultant de nos mécanismes émotionnels et mentaux, n'est que le produit des déchets ordinaires, immémoriaux, en quête de mutation.
Aussi loin qu'elle désire aller, l'imagination porte les traces résiduelles de sa fabrication.
Même si elles soulagent un moment et qu'elles sont qualifiées de “travail”, les poubelles de culture et leur champ d'épandage galeriesque ou muséal, encombrent d'un système commercial les splenseurs de la pensée”.

"L'art, comme la vertu, ne requiert nullement d'être surajouté à notre état naturel que l'abondance du vide sustente. Tout prolifère en expension, le négatif amoindrissant comme le positif dilatatoire.
La fontaine de Jouvence est une des plus anciennes images de l'art : en Sumer, Akkad, Elam, plus tard à Mathura, etc.
Elle donne, donne, donne...
L'offrande est bien davantage qu'une réponse à cette profusion d'amour, “elle danse avec”, symboliquement (sim-ballein), tel un surfeur sur une vaste mer. C'est en allant qu'on connaît!
Le talent se goûte vraiment en non-violence, c'est à dire en état d'abandon à l'état naturel. Il est fatiguant de garder, à l'intérieur de nous, une place pour les aliens mentaux et les postiches émotionnels, dont la culture contraint le goût de masse par la publicité.”

Yahne Le Toumelin "Lumière, rire du ciel" Editions Pauvert 2001