Les quatre catégories de psy et leur intégration
Il y a quatre catégories de psy. Ce sont comme quatre familles qui travaillent dans des domaines différents et utilisent des techniques et des méthodes, elles aussi différentes, mais elles ont tendance à se comporter depuis la loi Accoyer de 2004, comme des frères et soeurs ennemis, alors qu'elles sont complémentaires et pourraient très bien procéder à des intégrations harmonieuses.
Il ya d'abord les psychiatres.
Ce sont des médecins qui ont donc fait des études de médecine et se sont spécialisés en psychiatrie. Ils s'occupent des maladies mentales, c'est à dire des troubles psychologiques graves, nécessitant souvent des soins hospitaliers.
Ils sont les spécialistes de la psychopathologie et leur bible, pour la plupart, se réduit au fameux DSM IV répertoriant plusieurs centaines de cas cliniques, auxquels correspondent des traitement le plus souvent médicamenteux.
Quelquefois les psychiatres, pour compléter leur spécialisation, font des stages dans des intituts privés de psychanalyse ou de techniques psychothérapeutiques, auxquels cas ils prennent l'appellation d'office de "psychiatre - psychothérapeute ou psychanalyste".
Il y a ensuite les psychologues cliniciens.
Ils sortent des universités de sciences humaines, spécialisées en psychologie et ont un niveau master (bac +5). Pendant ces études essentiellement théoriques, ils étudient la psychopathologie avec quelques stages pratiques en institution, et les différents courants de la psychologie clinique avec l'insistance mise sur le diagnostic et les critères statistiques (la psychologie issu du pradigme scientifique du 19e siècle).
Ils étudient aussi théoriquement les différents courants psychothérapeutiques et psychanalytiques.
Plus tard, ils travaillent souvent en institution dans les hôpitaux, dans les écoles, les entreprises, etc.... Quelquefois, comme les médecins, pour parfaire leur formation, les psychologues se forment à certaines techniques psychothérapeutiques dans des instituts privés et ils prennent aussi le titre de psychothérapeute, sans que soient définis les critères d'attribution de ce titre supplémentaire.
Il y a encore les psychanalystes.
Ils se sont formés dans les multiples écoles de psychanalyse représentant les courants de cette spécialité fondée par Freud au début du siècle dernier, puis ayant éclatée selon les différents disciples dissidents.
En France, les lacaniens disciples de Jacques Lacan, sont assez nombreux et ont encore quelques chaires d'université. Pour obtenir le titre de psychanalyste, ils se cooptent dans chaque école suivant leurs propres critères. En général, ils tiennent à leur spécialisation en psychanalyse et à leur titre de psychanalyste, sans vouloir le titre de psychothérapeute et se mélanger à cette nébuleuse qu'ils méprisent un peu, du haut de l'âge vénérable de leur histoire.
Il y a enfin les ex-psychothérapeutes
Depuis le décret de mai 2010, ils s'appellent souvent "psychopraticiens" puisqu'ils ont été obligés de changer de titre.
La "nébuleuse" constituant cette 4e famille, vient de la variété et de la diversité des courants et des techniques employées : il y a les psychothérapies humanistes avec principalement la Gestalt, la PNL, l'hypnose éricksoniènne, l'analyse transactionnelle, la méthodes rogérienne, la psychosynthèse, etc...Il y a aussi les psychothérapies psychocorporelles issues du courant reichien (rebirth, bioénergie,etc..), les psychothérapies systémiques (les thérapies familiales et de couple), les psychothérapies du courant TCC (thérapies cognitives et comportementales) les psychothérapies transpersonnelles (respiration holotropique, intégration de diverses techniques spirituelles), des psychothérapies récentes style EMDR, EFT (emotionnal freedom technique, ACT (acceptation commitment technique), enfin il ya la psychothérapie intégrative qui utilise ces techniques et ces courants conjointement de manière cohérente et créative.
Toutes ces techniques variées sont enseignées dans de nombreux instituts privés de formation, dont les plus sérieux ont été dûment répertoriés selon des critères rigoureux par les fédérations de psychothérapeutes (SNPPsy, FF2P, Psy en mouvement).
De plus, ces fédérations ont mis au point des critères de qualité pour définir le titre et la profession de psychothérapeute, de manière à mieux définir et unifier autour de ce titre la diversité des méthodes. Huit critères principaux peuvent être retenus :
1. avoir fait une psychothérapie ou psychanalyse personnelle, c'est à dire un travail sur soi-même (de préférence au moins deux ans) ;
2. avoir une qualification et une validation à une technique dans un institut privé répertorié par les fédérations professionnelles (au moins 4 ans de formation, 1500 heures);
3. avoir une formation théorique en psychologie, en particulier en psychopathologie suffisante, donnée le plus souvent à l'intérieur de ces instituts privés (ou dans une formation universitaire).
4. suivre une supervision ou une covision dès que l'on a des clients (au moins deux ans).
5. signer un engagement déontologique de la profession.
6. Des équivalences et des aménagements sont nécessaires, par exemple pour la psychothérapie intégrative (nombre d'heures de formation aux différentes techniques équivalentes à la formation et la certification à une seule technique)) et par rapport à l'ancienneté de la pratique professionnelle pour ceux qui exercent depuis longtemps.
7. Un niveau obligatoire d'entrée dans un instuitut privé d'au moins Bac +3, demandé par les instituts répertoriés.
8. une formation continue et permanente aux différentes et nouvelles techniques.
On est donc loin des charlatans que dénonçe le député Accoyer, posant leur plaque de psychothérapeute après seulement deux jours de stage . C'est plutôt le contraire : les critères sont particulièrement exigeants. Ainsi par exemple, une école comme l'EPG à Paris (Ecole Parisienne de Gestalt) demande :
à l'entrée : un niveau bac +3 et 2 ans de psychothérapie personnelle. Puis la formation à la Gestalt comprend un premier cycle de 240 heures pendant 1 an, un 2e cycle de 400h pendant 2 ans, puis un 3e cycle de 430 h pendant 2 ans avec la remise d'un mémoire, enfin une supervision pendant au moins 2 ans de pratique professionnelle. Alors seulement, la certification de psychopraticien gestaltiste est décernée. Personnellement, quand je fais le total de mes heures de formation en psychothérapie intégrative pendant une dizaine d'années, j'arrive à la somme d'à peu près 2500 heures de formation comprenant la formation aux différentes techniques dans des instituts privés, un DU universitaires et une formation en psychopathologie dans un institut privé - si j'inclus les psychothérapies personnelles et les supervisions, cela dépasse largement les 3000 heures, c'est à dire plus d'une dizaine d'années de formation qui d'ailleurs ne s'arrêtera jamais, car dans ce domaine la formation me semble devoir être particulièrement permanente, aussi bien par rapport aux techniques qui se renouvellent sans cesse, que par rapport au travail sur soi-même qui n'est jamais terminé - c'est un critère à rajouter absolument.
Depuis la loi Accoyer en 2004 jusqu'au décret d'application récent de Roselyne Bachelot (mai 2010), il y a un déni de la 4e catégorie de psy - les ex-psychothérapeutes issus des instituts privés de formation -, déni les conduisant,
au pire, à leur exclusion du titre de psychothérapeute, pour chercher un autre titre,
au mieux devant des commissions de contrôle constituées de personnes extérieures à leur spécificité et chargées de les juger (les ARS).
D'autre part les trois premières catégories (médecins psychiatres, psychologues cliniciens et certains psychanalystes) veulent s'arroger le titre, sans satisfaire à aucun des critères qui font jusqu'ici la spécificité, la richesse et l'efficacité de la psychothérapie en place depuis longtemps (travail sur soi, formation approfondie à une ou plusieurs techniques, supervision). Il s'agit là d'une sorte de hold-up d'un titre et de son contenu, accompagné d'une sorte de dévoiement, de déformation ou de dépouillement du sens de ce titre, vers une conception médicale psychopathologique ou une conception universitaire de psychologie clinique. Le titre de psychothérapeute serait réservé et réduit à des "psychopathologues"de l'université issus des formations universitaires médicales et psychologiques.
C'est une déformation de sens grave quand on sait que les domaines d'application de la psychothérapie n'appartiennent pas majoritairement au domaine de la psychopathologie réservée aux maladies mentales graves, mais à l'accompagnement des maux de la vie quotidienne d'une société en crise. Cela enlève aussi à ce titre toute sa richesse selon les critères de formation décrits précédemment et qui montrent tous les jours leur efficacité.
Pour trouver une solution harmonieuse et intégrative, prenant en compte les différences de ces quatre catégories, il faudrait juste changer d'esprit :
en particulier renoncer à la stratégie prédatrice la plus archaïque de la conscience humaine qui pourrait se résumer à l'adage : "les gros mangent les petits", car il est vrai qu'en nombre, psychiatres et psychologues cliniciens sont beaucoup plus nombreux que les psychothérapeutes (13 000 psychiatres et 40 000 psychologues contre 7 à 10 000 psychopraticiens et autres désignations (dont 1500 viennent d'être répertoriés dans l'annuaire des thérapeutes du journal Psychologies hors-série mars-avril 2009 selon les critères des principales fédérations FF2P, Psy en mouvement, SNPPsy, Affop).
Pour cette intégration, les frères ennemis doivent faire un saut qualitatif d'évolution de la conscience, de manière à passer d'une pensée excluante fondée sur l'hégémonie des uns sur les autres, à une pensée intégrative capable de prendre en compte la diversité des points de vue et l'unité toujours possible qui les inclut et les transcende, cela par rapport à l'objectif commun : la santé psychique du plus grand nombre.